Envisager de structurer son exploitation agricole sous la forme d’une Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée, ou EARL, se présente souvent comme une option stratégique pour de nombreux agriculteurs désireux de protéger leur patrimoine personnel tout en bénéficiant d’une structure flexible et adaptée aux réalités du secteur agricole.
En bref
Une EARL, ou Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée, est une forme juridique qui permet aux agriculteurs de séparer leur patrimoine personnel du patrimoine professionnel dédié à leur activité agricole. Voici les points clés de ce statut :
- Limitation de la responsabilité aux apports de chaque associé, protégeant ainsi le patrimoine personnel.
- Flexibilité dans la gestion et la transmission de l’exploitation, notamment grâce à la possibilité d’intégrer des associés familiaux.
- Adaptabilité fiscale, avec la possibilité de choisir entre l’imposition sur le revenu ou l’imposition sur les sociétés.
- Cadre légal défini par le Code rural et de la pêche maritime et le Code civil.
Nous aborderons ces aspects à travers différentes sections, en mettant l’accent sur les implications pratiques pour les exploitants agricoles.
Qu’est-ce qu’une EARL exactement ?
Une EARL, ou exploitation agricole à responsabilité limitée, est une société civile à objet agricole dotée de la personnalité morale. Elle a été créée par la loi du 11 juillet 1985 dans le but de donner une autonomie patrimoniale aux exploitations agricoles, tout en leur permettant de conserver un caractère familial si souhaité. L’EARL est régie par les articles L. 324-1 à L. 324-11 et D. 324-2 à D. 324-4 du Code rural et de la pêche maritime, ainsi que par les articles 1845 et suivants du Code civil.
Concrètement, l’EARL permet à des exploitants agricoles de se regrouper au sein d’une même structure juridique. Ils peuvent ainsi mutualiser leurs moyens de production, leurs compétences et leurs capitaux. L’EARL offre l’avantage de la responsabilité limitée : les associés ne sont responsables des dettes sociales qu’à hauteur de leurs apports. Leur patrimoine personnel est donc protégé en cas de défaillance de la société.
Caractéristiques d’une EARL
Voici les principales caractéristiques d’une EARL :
- Le nombre d’associés est limité à 10 maximum.
- Les associés majoritaires doivent obligatoirement être des exploitants agricoles.
- Le capital social minimum est fixé à 7500€.
- La responsabilité des associés est limitée à leurs apports dans la société.
Nous pouvons donc constater que l’EARL est une forme sociétaire relativement contraignante, notamment en termes de capital minimum exigé et de nombre d’associés limité. Cependant, elle présente de nombreux avantages pour les exploitants agricoles, comme nous allons le voir.
Avantages d’une EARL
L’EARL offre de multiples avantages aux exploitants agricoles qui souhaitent se regrouper au sein d’une même structure :
- La possibilité de créer l’EARL seul ou à plusieurs associés, jusqu’à 10 maximum.
- Le principe de responsabilité limitée qui protège le patrimoine personnel des associés.
- Une fiscalité avantageuse, avec l’imposition à l’impôt sur le revenu (IR) ou la possibilité d’opter pour l’impôt sur les sociétés (IS).
- L’acceptation d’associés non-exploitants minoritaires, qui peuvent apporter des capitaux supplémentaires.
- Une facilité pour la transmission de l’exploitation en cas de départ à la retraite ou de décès d’un associé.
Comme vous pouvez le constater, l’EARL présente de nombreux atouts pour les exploitants agricoles désireux de s’associer. Cependant, elle comporte également quelques inconvénients qu’il convient de prendre en compte.
Inconvénients d’une EARL
Si l’EARL offre de belles perspectives aux exploitants agricoles, elle n’est pas exempte d’inconvénients :
- Le nombre d’associés est limité à 10, ce qui peut être contraignant pour le développement futur de l’exploitation.
- Un capital social minimum de 7500€ est exigé, ce qui peut représenter une somme importante à réunir pour les associés fondateurs.
Malgré ces inconvénients, l’EARL reste une forme sociétaire très prisée dans le monde agricole. Voyons maintenant comment procéder pour créer une EARL.
Créer une EARL
Pour créer une EARL, plusieurs étapes sont nécessaires. Tout d’abord, il faut rédiger les statuts de la société, qui définiront son fonctionnement et les règles applicables entre les associés. Ces statuts doivent notamment préciser la répartition du capital social entre les associés.
Une fois les statuts rédigés, il faut procéder au dépôt des fonds correspondant au capital social sur un compte bancaire bloqué. Les apports en nature éventuels doivent quant à eux être évalués par un commissaire aux apports.
Viennent ensuite les formalités de publicité légale. Un avis de constitution doit être publié dans un journal d’annonces légales du département du siège social. Une insertion doit également être faite au Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC).
Enfin, le dossier complet de création de l’EARL doit être déposé au greffe du Tribunal de Commerce en vue de l’immatriculation de la société au Registre du Commerce et des Sociétés (RCS). Cette immatriculation confère la personnalité morale à l’EARL.
Fonctionnement d’une EARL
Une fois l’EARL créée, il convient d’en assurer le bon fonctionnement au quotidien. La gérance de la société est assurée par un ou plusieurs associés exploitants, désignés dans les statuts ou par l’assemblée générale. Le ou les gérants sont chargés de la direction et de la représentation de l’EARL.
Concernant le droit de vote au sein de l’EARL, les statuts peuvent prévoir que chaque associé dispose d’une voix, quelle que soit sa participation au capital social. À défaut, le droit de vote est proportionnel aux parts détenues par chaque associé.
Les associés exploitants ont droit à une rémunération qui constitue une charge sociale pour l’EARL. Cette rémunération est plafonnée à 3 fois le SMIC annuel, ou 4 fois pour les gérants. Le partage des résultats entre les associés est quant à lui défini par les statuts, à défaut de quoi il est proportionnel aux parts détenues.
Un point important concerne l’apport du bail rural à l’EARL. Le preneur d’un bail rural peut en effet l’apporter à la société avec l’accord du bailleur. Il peut également mettre son droit à disposition de l’EARL sans attribution de parts sociales, à condition d’en informer le bailleur dans un délai de 2 mois.
Enfin, la dissolution d’une EARL intervient dans les mêmes cas que pour les autres sociétés civiles : expiration du terme, réalisation ou extinction de l’objet social, décision des associés, etc. L’EARL peut également être dissoute si les conditions de sa constitution ne sont plus respectées et que la situation n’est pas régularisée dans un délai d’un an, ou de trois ans en cas de décès ou d’incapacité.
Régime fiscal et social
Du point de vue fiscal, l’EARL bénéficie d’un régime de faveur. Par défaut, les bénéfices sont imposés à l’impôt sur le revenu (IR) au niveau de chaque associé, au prorata de sa participation dans le capital. Cependant, l’EARL peut opter pour l’impôt sur les sociétés (IS) si cette solution s’avère plus avantageuse fiscalement.
Sur le plan social, les associés exploitants d’une EARL sont obligatoirement affiliés au régime de protection sociale agricole géré par la Mutualité Sociale Agricole (MSA). Dans une EARL unipersonnelle, l’associé unique relève du régime des non-salariés agricoles. Dans une EARL pluripersonnelle, les associés exploitants peuvent relever du régime des non-salariés ou des salariés agricoles, selon l’existence ou non d’un contrat de travail avec la société.
Nous espérons que cet article vous a permis de mieux comprendre ce qu’est une EARL et son fonctionnement. N’hésitez pas à nous contacter si vous avez d’autres questions !